Par Linda BENNIS BSc (Hons), Physiologiste et Nutritionniste Équin
On ne soulignera jamais assez les bénéfices psychologiques et physiologiques des fibres dans l’alimentation équine… Tous les chevaux ont besoin de fibres, quelle que soit leur race, et leur activité.
Les chevaux évoluent en tant qu’herbivores de pâturages et ont été conçus pour digérer de petites quantités de substances végétales fibreuses au cours de longues périodes quotidiennes. Le gros intestin (le caecum et le colon) est le «site digestif» principal, où sont d’ailleurs concentrés la plupart des désordres digestifs.
Le gros intestin joue le rôle d’un espace de maintien qui fermente continuellement de grandes quantités de fibres par l’action de milliards de microbes digestifs… Ces microbes fonctionnent dans un environnement au pH stable (6,4-6,7), et ne s’adaptent pas correctement à la fluctuation de l’acidité intestinale.
L’ingestion de fibres assure également la mobilité en continu de l’intestin (Péristaltisme) ce qui est absolument nécessaire pour maintenir les aliments en mouvement le long du tube digestif et prévenir les impactions gastriques (L’impaction gastrique est une maladie rare et mal définie chez les équidés. Elle est caractérisée par une accumulation persistante et progressive d’aliments déshydratés dans l’estomac qui ne s’évacuent pas après une période de jeûne prolongée. L’ingestion de paille est souvent cause d’impaction gastrique).
De nos jours élever des chevaux signifie que de nombreux individus sont maintenus dans des boxes et nourris de repas à base de céréales. Le cheval n’a pas été conçu pour digérer efficacement des repas concentrés en amidon, ainsi l’homme a créé chez le cheval des désordres digestifs comme les coliques et les fourbures pour les plus courants.
La nourriture ingérée passe relativement rapidement dans le petit intestin, et peut ne pas être complètement digérée quand elle entrera dans le gros intestin. La dégradation de l’amidon dans le gros intestin entraine une production d’acide lactique et une baisse de pH. Les microbes aidant à la digestion des fibres ne peuvent prospérer dans cet environnement acide et commencent à mourir les uns après les autres, induisant des perturbations digestives…
Les conditions acides affectent également la muqueuse sensible de l’intestin et des endotoxines sont libérées dans le système sanguin.
Dans des conditions naturelles, les chevaux passent 16 à 18h par jour à manger. Cela implique une immense quantité de mâchonnements et mastications – jusqu’à 3600 mâchonnements par heure ! (Cuddeford, 1999)
Nourrir un cheval avec des repas à base de céréales et avec peu de fibres réduira drastiquement son temps de nourrissage. Réduire le temps de mastication signifie réduire la production de salive qui est nécessaire à la lubrification des aliments et à l’amortissement de l’acide gastrique, sans cela des ulcères gastriques peuvent se former… (Pagan, 1997)
Certains chevaux, chez qui l’on empêche d’exprimer des comportements évolués normaux, peuvent montrer des problèmes comportementaux ou manifester leur frustration par des comportements stéréotypés tels que le tic à l’appui, ou le tic de l’ours… (Fraser 1992). En enfermant les chevaux dans des écuries, et en les nourrissant avec des repas distincts, nous les avons coupés de deux de leurs instincts les plus fondamentaux. En premier lieu nous les coupons de cet instinct d’itinérants en les enfermant dans une « boîte », et deuxièmement, nous remplaçons leurs besoins fondamentaux en fibres par des repas rapides emplis de sucre et d’amidon. Nous devons nous efforcer d’accepter un compromis par lequel nous pouvons profiter de nos loisirs équins sans le faire au détriment de la santé physiologique et psychologique du cheval.
Rappelez-vous… LE CHEVAL D’ABORD !