Par Claire Vandenbulcke, Équité – le cheval juste (29)

Je m’appelle Claire Vandenbulcke, je suis la créatrice des « Chevaux d’Arcand », une école d’équitation où l’on donne autant d’importance à la compréhension qu’à la relation et à l’équitation.

Mon parcours m’a amenée à questionner bon nombre de croyances, concepts et habitudes du monde équestre, en particulier sur cette notion qui me semble capitale : comment savoir ce qu’est en train de dire mon cheval ?

De quoi parle-t-on ?

Le cheval est un animal social et grégaire. A ce titre, il vit (normalement) avec d’autres congénaires et interagit avec eux ainsi qu’avec son environnement. Il a comme toutes les espèces, un éthogramme (inventaire des comportements de l’espèce) et il se trouve qu’à force d’études, celui du cheval commence à être assez documenté.

Je vais donc attirer votre attention sur tout ce que l’on peut observer et quantifier et surtout, quel est le message derrière ces comportements (à la lumière des découvertes actuelles).

Pourquoi se plonger dans l’observation ?

Notre capacité à lire le cheval avec justesse va conditionner son bien être, la qualité de la relation et la facilité d’apprentissage. Alors ça vaut le coup de s’y intéresser non ?

Y a t’il des pré-requis ?

Non, c’est ça qui est formidable, l’envie suffit. Ensuite, nos sens s’affinent et perçoivent de mieux en mieux les signaux à force de pratiquer.

Alors comment on s’y prend ?

Pour ma part, je superpose les grilles de lecture, je vais donc vous décrire brièvement celles que j’utilise.

1 – Le tempérament

Le tempérament est la partie innée du caractère. En gros : 

Tempérament + vie sociale, expériences diverses avec l’Homme, conditions de débourrage et d’utilisation = Caractère

Cette partie innée est très peu modifiable et imprègne le cheval à vie. Il est donc capital de repérer quelle(s) dimensions s’exprime(nt) chez notre cheval.

Les 5 dimensions sont :

  • L’émotivité : soit la tendance qu’a le cheval à réagir plus ou moins fortement aux évènements soudains (exemple : surprise) ou nouveaux (exemple : passer sur une surface inconnue)
  • La grégarité : supporte-t-il de se séparer d’autres chevaux ?
  • L’activité locomotrice : est-ce un animal qui bouge spontanément ou pas du tout ?
  • La réactivité vis-à-vis des humains : vient-il facilement au contact d’un homme non familier ?
  • La sensibilité sensorielle : a-t-il tendance à réagir plus ou moins fortement à des stimulations, notamment tactiles 

J’ai par exemple un de mes chevaux qui est émotif, grégaire, sensible et actif. Comprenez qu’il meurt d’une crise cardiaque en croisant un papier par terre, collapse s’il doit s’éloigner du troupeau, ne supporte que les tapis et les sangles en mouton véritable épaisseur 20 cm et a besoin de bouger pour ne pas devenir neuneu.

Heureusement, son haut  gradient d’intérêt à l’humain a permis d’avoir une porte d’entrée avec lui.

Il a 15 ans maintenant, il a bien sûr les mêmes dimensions de tempérament (c’est inné on a dit) ET parce que je n’ai pas été contre ce qui est inné, je peux aujourd’hui partir seule avec lui en toute sécurité.

Bien sûr, quelqu’un qui souhaiterait faire de la randonnée au long cours avec un cheval aurait fait une erreur de casting monumentale en prenant un cheval avec ces dimensions de tempérament ! Le tempérament est un élément déterminant à prendre en compte pour qu’il soit cohérent avec nos projets équestres.

2 – Les 3 réactions au stress

On va faire court: chaque fois que mon cheval a un comportement qui me dérange, je peux le raccrocher à une réaction au stress. (Ça ne fait pas plaisir mais c’est comme ça. Et si ce n’est pas du stress, c’est qu’il a mal, ce n’est pas vraiment mieux).

1° CAS: Mon cheval est mou, lourd, lent, se durcit, n’avance pas, se renferme, a les yeux dans le vide

Il est dans la réaction d’INHIBITION, il se fige

2°CAS: Mon cheval regarde à l’opposé de moi, part au pas sans que je lui demande, bouge, s’agite, embarque, trépigne, essaie d’accélérer, ne tient pas l’arrêt

Il est dans la réaction de FUITE

3°CAS: Mon cheval mordille les vêtements, la longe, le matériel, gratte de l’antérieur, menace (dents, postérieurs), couche les oreilles, fronce les naseaux, mord, bouscule, donne des coups de tête, envoie les antérieurs/postérieurs, se cabre

Il est dans la réaction de LUTTE, il se fâche.

3 – Observables faciaux

La tête du cheval est une mine d’informations. Avec ces informations, on pourra :

  • détecter et quantifier la douleur grâce à la Horse Pain Grimace Scale
  • Avoir des informations sur son état de stress
  • Avoir des informations sur son “humeur”

4 –  Les Focus

On peut regrouper les centres d’intérêt des chevaux en 6 grands thèmes.

FOCUS ENVIRONNEMENT
Le cheval regarde un point de son environnement, oreilles pointées vers ce point

FOCUS TROUPEAU
Le cheval regarde vers ses congénères oreilles pointées vers eux, il peut aussi hennir

FOCUS ALIMENTATION
Le cheval broute, mange des branches, son aliment, etc.

FOCUS CURIOSITÉ
Le cheval s’intéresse à un objet, le pousse, le prend dans sa bouche, l’inspecte avec son nez

FOCUS HUMAIN
Le cheval regarde et pointe les oreilles vers l’humain

AUTO FOCUS
Le cheval “s’introspecte”, ses oreilles tournées vers lui même, se chasse une mouche, se gratte, etc.

Être conscient des focus de son cheval, vérifier qu’il passe facilement d’un focus à l’autre et qu’il répartit son temps dans les 6 focus nous permet de savoir s’ il est ÉQUILIBRÉ.

Tout focus qui va prendre une part trop importante dans sa vie nous indique qu’il y a quelque chose à faire, que le cheval n’est pas dans un état de bien être.

5 – Les places

Mon cheval accepte t’il que je me tienne à chaque épaule, chaque hanche, devant et derrière lui sans qu’il se sente obligé de bouger ? Et ceci à toutes les distances de lui ? Et qu’il soit juste prêt à passer un bon moment ensemble chaque place à ne rien faire ? Vous observerez facilement des chevaux qui vont bouger pour vous remettre à la place qui est confortable pour eux. Ils vont se déplacer plus ou moins discrètement pour vous remettre devant eux, ou à l’épaule qu’ils préfèrent par exemple. Que le cheval se sente bien avec nous où que l’on soit autour de lui est une base importante de la relation.

6 – Les signaux d’apaisement

Définition simplifiée:

Un signal d’apaisement est pour le cheval une manière de dire “Euh, je ne me sens pas trop bien avec cette situation ou cette demande, pourrions nous faire autre chose ou autrement?”.

Comme vous voyez, c’est plutôt sympa de leur part! Là ou ça pique, c’est que bon nombre de ces signaux, soit passent inaperçus, soit sont interprétés comme de la détente.

Liste non exhaustive de signaux d’apaisement:

– Mâchouiller

– secouer l’encolure

– se gratter la bouche sur l’antérieur

– gratter le sol avec l’antérieur

– regarder fixement du côté inverse de là ou se situe l’humain sans bouger les pieds (comme sur la photo)

– détourner le regard

– sans bouger l’encolure, avoir les yeux qui regardent du côté inverse de là ou se situe l’humain sans bouger les pieds

– bailler

– se secouer

– se rouler

– le cheval vient mettre sa tête entre l’humain et son corps

– s’ébrouer

– baisser la tête

– …

7 – Les comportements de substitution

Ce sont en général des stéréotypies (tics). Ce peut être également des  paraissant assez souvent dénuées de tout rapport logique avec les conditions présentes, et en discordance avec les comportements qui précèdent ou qui suivent, ces activités ont pu faire penser que l’animal agit alors de façon un peu « folle ».

Ces comportements reflètent une souffrance et un mal/être profond que le cheval subit sans pouvoir y apporter de solution. Ce sont des comportements répétitifs qui apparaissent :

  • Lorsqu’un de ses besoins fondamentaux n’est pas respecté (contact social, mouvement, nourriture fibreuse en abondance, espace)
  • Pour faire face à un stress lorsque le cheval se sent impuissant ou ne peut exprimer sa réaction normale au stress (situation anxiogène, absence de nourriture trop prolongée)

8 – Locomotion

Avoir dans la tête les observables d’une locomotion « normale » permet de repérer lorsque celle-ci s’altère. Diagonaux qui se désynchronisent au trot, équilibres défectueux, altération de la cinétique normale des membres, altération des poser, latéralisation du pas sont quelques exemples de détérioration de la locomotion.

Les causes peuvent être multiples (douleur, travail, inadapté, parage/ferrure inadaptés…). La lecture de la locomotion va donner des indices précieux sur la compréhension du corps et du travail du cheval.

9 – Observation du cheval « nu » à l’arrêt

Avant de se mettre en mouvement, un corps communique déjà une somme impressionnante d’informations précieuses. L’apparence générale (longiligne, bréviligne, médioligne), les proportions entre les différentes parties du corps, les orientations (d’épaule, bassin, etc.), les aplombs, renseignent sur la santé, le travail, le caractère et l’alimentation.

La superposition de ces grilles de lecture me permet déjà d’avoir une idée précise de ce qu’exprime le cheval. Comme vous avez pu le constater, cela bouscule quelques idées reçues ! Vous trouverez sous cet article une liste de liens vous permettant si vous le souhaitez d’aller creuser un peu plus chaque sujet.

Si ensuite, vous avez envie d’explorer plus en avant la compréhension profonde du cheval et surtout savoir quoi répondre à ses signaux, je vous propose de me contacter pour créer un programme en fonction de vos besoins.

Merci d’avoir pris ce temps de lecture

Claire

Qu’est-ce qu’un éthogramme
Les 5 tempéraments
Observables de mal-être : Horse pain grimace scale : numéro 1 et numéro 2
Les focus et les places
Les signaux d’apaisement
Comportements de substitution
Locomotion
Conformation

Comprendre profondément son cheval

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